Créée en 1992, la station de radio Beur FM se taille rapidement une place reconnue dans le paysage audiovisuel français. Pourtant, un peu plus de dix ans après sa création, la radio rencontre des difficultés financières qui la mènent au redressement. Sa dirigeante, Djima Kettane, se lance alors dans un pari fou : réveiller la belle endormie et lui redonner tout son lustre.
Lorsqu’elle accède à la direction de Beur FM à la fin de l’année 2013, Djima Kettane sait que les difficultés ne font que commencer. Deux mois plus tard en effet, la station est placée en redressement judiciaire. Le déficit accumulé est trop lourd, la radio ne peut plus faire face aux factures qui s’empilent. Charges sociales, droits d’auteurs, frais de fonctionnement importants : la société affiche une dette de 3,2 millions d’euros. « La situation était difficile, c’est vrai, mais pas insurmontable. J’ai tout de suite compris que pour redresser la barre, il faudrait que j’engage toute mon énergie, mon temps et que je me porte garante de la bonne exécution du plan », explique la dirigeante.
Rebondir à force de travail
Un an et demi plus tard, l’entreprise sort la tête de l’eau. Le redressement judiciaire laisse place à un plan de continuation sur dix ans. La dette a été considérablement réduite grâce aux efforts instaurés, passant de 3,2 à 1,9 millions d’euros. « J’ai eu la chance d’être particulièrement bien entourée. Notre administrateur judiciaire et notre banque (la banque Delubac & Cie – ndlr) nous ont accompagnés de manière bienveillante et efficace. Sans cela, je n’aurais pas pu trouver la confiance nécessaire pour avancer. »
Djima Kettane ne ménage pas sa peine, et se voit souvent confrontée à des décisions difficiles, comme de devoir réduire les équipes ou couper dans les mètres carrés. « On n’a jamais le beau rôle en tant que dirigeant dans ces moments-là. Mais ce qui m’importait, c’était de sauver la radio. J’ai aussi fait des choix dont je suis fière, par exemple d’investir dans un studio numérisé. » Une trajectoire payante : la station obtient des fréquences supplémentaires. Elle en compte 38 aujourd’hui, contre 18 en 2014, et a réalisé un chiffre d’affaires de 1,7 millions d’euros en 2023. « C’est l’une de mes plus grandes satisfactions que de pouvoir recenser 550 000 auditeurs par jour, dont 120 000 pour la seule région parisienne. Une belle récompense après ces années passées à batailler pour survivre ! »
Une expérience qui façonne le dirigeant
En 2027, l’entreprise sortira du plan de continuation. Pour rendre ce qu’elle a reçu, elle a prêté serment en tant que magistrate à titre temporaire auprès du tribunal de commerce de Créteil en novembre dernier, afin d’accompagner des dirigeants qui traversent la même épreuve. Que retient-elle de l’aventure ? « Dans ces situations, il faut être seul maître à bord. Il faut croire à son projet, être prêt à y consacrer ses jours (et ses nuits) et à prendre des décisions, qu’elles soient bonnes ou mauvaises, l’important étant d’avoir un cap. Redresser une entreprise, c’est aussi se redresser soi-même, on en sort grandi et sans doute mieux armé en tant que dirigeant. » Une mission résolument accomplie !